Les origines africaines des tableaux de Picasso
Quand vous pensez à Pablo Picasso, vous imaginez immédiatement le génie créatif, l’inventeur du cubisme, celui qui a révolutionné l’art du XXe siècle n’est-ce pas? Mais une vérité trop souvent oubliée — ou volontairement passée sous silence — est que l’Afrique a profondément inspiré cet artiste et son mouvement artistique, le cubisme. Découvrez toute l’histoire dans cet article.
4/17/20254 min read
La rencontre qui a changé l’histoire de l’art moderne
En 1907, Picasso visite pour la première fois le musée d’ethnographie du Trocadéro à Paris (aujourd’hui le musée du quai Branly). Ce lieu, poussiéreux et mal éclairé, regorgeait de sculptures et de masques africains, notamment originaires du Congo, du Gabon et de la Côte d’Ivoire.
Ce jour-là, face aux masques et sculptures d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale, l’artiste espagnol allait vivre une expérience qui transformerait non seulement sa propre trajectoire artistique, mais l’ensemble de l’art occidental du XXe siècle.
Cette rencontre avec l’art africain n’est pas sortie de nulle part. Elle s’inscrivait dans un contexte où l’Europe coloniale rapportait d’Afrique des objets considérés alors comme de simples « curiosités ethnographiques ».
Pourtant, ces œuvres allaient devenir le catalyseur d’une révolution esthétique sans précédent.


Les « Demoiselles d’Avignon » : le tournant décisif
Peinte cette même année, « Les Demoiselles d’Avignon » marque un tournant radical dans la carrière de Picasso et dans l’histoire de l’art.


Regardez bien les visages des deux femmes à droite : ce sont des visages inspirés de masques africains, anguleux, abstraits, bruts.
Leurs visages sont directement inspirés des masques Dan (Côte d'Ivoire) et Fang (Gabon).
La géométrisation des formes, la simplification des traits, l’abandon de la perspective traditionnelle — tous ces éléments qui caractériseront le cubisme trouvent leur origine dans cette influence africaine.
Contrairement aux idées reçues, Picasso n’a pas simplement emprunté l’esthétique des masques africains.
Il s’est approprié les formes, les lignes, la force expressive des arts africains traditionnels pour les intégrer à son propre langage artistique.
« Ce n’est pas qu’ils soient beaux, c’est qu’ils sont puissants. » dira Picasso en parlant des masques africains.
Il a été profondément touché par leur dimension spirituelle et leur fonction sociale. « Ces masques n’étaient pas des sculptures comme les autres, » ajoutera-t-il plus tard. « Ils étaient des objets magiques. »
Ce que Picasso a saisi intuitivement, c’est que l’art africain dépassait la simple représentation pour atteindre une dimension symbolique, expressive et conceptuelle. Les artistes africains déformaient délibérément les proportions et simplifiaient les formes pour exprimer des vérités spirituelles plutôt que des apparences physiques.
Le cubisme : une vision multiple de la réalité
En adoptant cette approche conceptuelle, Picasso et son collègue Braque développèrent le cubisme — un style qui rejette la perspective unique au profit d’une vision multiple, montrant simultanément plusieurs facettes d’un même objet.
Cette révolution artistique doit beaucoup à la conception africaine de l’art, où une sculpture peut représenter simultanément plusieurs aspects d’une entité spirituelle.
Des œuvres comme « Guitare » (1912), « Tête de femme » (1907-1908) ou « Trois Femmes » (1908) montrent clairement cette synthèse entre innovation occidentale et inspiration africaine.
Dans ces tableaux, Picasso abandonne définitivement l’illusion de profondeur pour une construction géométrique de l’espace qui rappelle l’approche des sculpteurs africains.
Un héritage longtemps minimisé
Pendant des décennies, l’influence africaine sur Picasso et le cubisme a été sous-estimée, voire ignorée par l’histoire de l’art occidentale.
On préférait insister sur les influences cézanniennes ou ibériques, plus « acceptables » dans le récit européocentrique de la modernité.
Ce n’est que récemment que les historiens de l’art ont pleinement reconnu le rôle crucial de l’art africain dans cette révolution artistique.
Des expositions comme « Picasso et les Arts d’Afrique » au Musée du Quai Branly en 2017 ont contribué à rétablir cette vérité historique.


Une contribution fondamentale à l’art mondial
L’influence africaine sur Picasso et le cubisme nous rappelle une vérité essentielle : l’art moderne occidental, souvent présenté comme une création purement européenne, doit en réalité beaucoup aux traditions artistiques d’autres continents, particulièrement l’Afrique.
Cette histoire nous invite à repenser l’art comme un dialogue interculturel plutôt qu’une série de traditions isolées.
Elle nous montre aussi comment les formes artistiques africaines, longtemps dénigrées comme « primitives », ont en réalité contribué à façonner certains des mouvements les plus sophistiqués de l’art du XXe siècle.
Conclusion
Aujourd’hui, tandis que les musées occidentaux commencent enfin à nous questionner sur l’origine de leurs collections africaines et à reconnaître la valeur artistique (et non plus seulement ethnographique) de ces œuvres, il est plus important que jamais de célébrer cette contribution africaine à l’art mondial.
Le cubisme de Picasso nous rappelle que l’innovation artistique naît souvent de la rencontre entre différentes traditions culturelles. Sans les sculpteurs anonymes d’Afrique de l’Ouest et d’Afrique Centrale, le visage de l’art moderne serait radicalement différent.
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